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Le purificateur initial [ + ]

     Dans les Entretiens sur la chimie de M. Ducoin-Girardin, édition de MDCCCLV, se trouve la description d'un purificateur d'eau, dénommé fontaine filtrante.

Le type de charbon

     Il serait trop long, et hors propos, de reproduire tous les éléments concernant le charbon, mais de l'ensemble, il ressort que le charbon à utiliser devra être "vivant", c'est à dire obtenu par calcination, et non-pas fossile. Son propos est basé sur les travaux de M. Salmon (cité dans le livre) et d'autres, tous mentionnés dans les Annales d' hygiène publique et de médecine légale . 1835, pp. 312 -314.

      Laissons la parole à M. Ducoin-Girardin :

     Le charbon décolore comme il désinfecte ; mais il faut ajouter que, pour cet usage, le charbon animal, moins riche en carbone, est le meilleurs. [...]

     Les filtres de charbon ne sauraient être trop recommandés aux personnes qui n'ont à leur disposition que des eaux de mauvaise qualité. Chacun peut se faire si facilement une fontaine filtrante, qu'il n'est pas raisonnable de compromettre sa santé par une négligence coupable.

     Pour ne pas avoir à démonter le filtre que vous voyez dans ce coin, voici une figure qui vous en indiquera les principales dispositions.

     Cette figure représente l'appareil coupé du haut vers le bas.

     A B vase en bois, en tôle, etc. On peut le remplacer par une vieille futaille, qu'on divise intérieurement en compartiments.

     Le compartiment C D forme presque la moitié de l'appareil. L'eau impure en occupe une partie plus ou moins grande D  ; il est fermé par un fond en bois, ayant au centre K une espèce de pomme d'arrosoir percée de trous et couverte d'une éponge.

     Le compartiment F est formé d'une couche épaisse de charbon entre deux couches de sable E et G.

      Au-dessous de G, autre fond en bois percé de trous à travers lesquels l'eau s'écoule.

     Le long des parois du vase il y a deux tubes d'air qui montent à la partie supérieure X et Z. Le premier doit descendre jusqu'à la première couche de sable, et le second jusqu'au dernier compartiment H, qui renferme l'eau filtrée. Ces deux tubes sont nécessaires pour faire communiquer toutes les parties de l'appareil avec l'air extérieur.

     Comme le charbon enlève à l'eau les gaz qu'elle retient, l'air n'est pas épargné ; mais une eau qui ne tient pas un peu d'air en dissolution est malsaine et indigeste. Avant de la boire, il faut l'agiter quelques temps pour qu'elle puisse redissoudre l'air qu'elle a perdu. Il faut avoir soin aussi de changer le charbon tous les cinq à six mois.

Que peut faire d'autre le charbon ? [ + ]

     Cédons de nouveau la parole à M. Ducoin-Girardin :

     L'une des particularité du charbon est d'absorber les gaz beaucoup plus que ne le font les autres corps poreux [...] Le charbon est donc, pour un gaz, ce qu'une éponge est pour l'eau [...]
     L'absorption des gaz par le charbon a fait découvrir dans ce corps une propriété qui, malheureusement, n'est pas assez connue. Le charbon désinfecte parfaitement les matières organiques en putréfaction [...] Je broie du charbon après l'avoir fait rougir pour lui faire rendre les gaz qu'il pourrait déjà avoir absorbé. Maintenant, sentez ce morceau de boeuf...
     - Il est infect.
     - Et ce poisson...
     - Pouah ! encore pis.
     - Eh bien ! Je mets tout cela dans de l'eau bouillante avec mon charbon concassé ; dans trois minutes le morceau de boeuf et le poisson n'auront plus aucune odeur.

     Petit aparté... Pour ceux qui rétorquerons à ces propos que, bien que l'odeur ait disparu, il existe un risque à consommer ces produits, il suffit de savoir que les bactéries sont détruites à une température de 60°C et donc, puisque les denrées ont été bouillies, soit portées à une température de 100°C, rien ne s'oppose à leur consommation.

     De même, il faut se souvenir que M. Heintz a mis au point sa recette de ketchup pour assaisonner les viandes en cours de putréfaction qui étaient servies aux USA aux 19e siècle... Comme partout ailleurs, dans les villes...

     S'ils avaient lu ce livre, jamais le ketchup n'aurait été inventé, pour le plus grand profit de la gastronomie !

     Reprenons la suite du discours.

     Lorsqu'on veut conserver les aliments pendant l'été, le meilleur garde-manger ne les empêche pas toujours de se corrompre ; enveloppez-les de charbon pilé, vous les conserverez longtemps. Avez-vous du bouillon déjà aigri, faites-le bouillir une ou deux minutes avec un charbon, il sera aussitôt purifié. C'est cette qualité du charbon qui le fait employer par les médecins dans le traitement de certaines plaies, et qui fait recommander l'emploi pour nettoyer la bouche. Les meilleures poudres pour les dents ont le charbon pour base.

     Ainsi, le charbon organique possède de multiples propriétés. Outre celles exposées ci-dessus, puisqu'il est composé essentiellement de carbone, va également, aux contacts des métalloïdes, dont l'oxygène, pouvoir combiner certains éléments en carbonates qui pourront être filtrés.

Les métalloïdes et leurs caractères chimiques [ + ]

Éléments Apparence physique Caractères chimique
Oxygène (air vital) Gazeux.
Sans couleur, odeur ni saveur.
Pesant à peu près comme l'air.
Il rallume une bougie presque éteinte.
Il est le seul air respirable
Il s'unit volontiers à tous les éléments
Hydrogène (air vital) Gazeux.
Sans couleur, odeur ni saveur.
14 fois et ½ plus léger que l'air
Il brûle avec une flamme peu intense.
Il forme de l'eau en brûlant avec l'air.
Il détone au soleil avec le chlore.
Carbone Solide.
Noir (ordinairement), sans odeur ni saveur.
Plus pesant que l'eau.
Insoluble.
Il brûle facilement, sans flamme s'il est pur.
Il forme, en brûlant, un gaz acide qui blanchit l'eau de chaux.
Il absorbe une grande quantité de gaz.
Soufre Solide.
Jaune clair, odorant, quand il est frotté
Sans saveur.
Fusible à +108°C.
Très combustible
Insoluble.
Il brûle facilement avec une jolie flamme bleue.
Il forme, en brûlant, un gaz suffocant et acide
Il prend, quand il s'épaissit, une couleur rougeâtre.
Phosphore Blanc de cire, souvent un peu coloré par la lumière.
Lumineux dans l'obscurité.
Odeur particulière.
Insoluble dans l'eau.
Il brûle à la température ordinaire.
Il répand, en brûlant, des vapeurs acides.
Il se liquéfie complètement à +43°C.
Chlore Gazeux.
Jaune verdâtre.
Très odorant.
Très pesant.
Il excite la toux de ceux qui le respirent.
Il agit à la manière de l'oxygène comme principe de la combustion.
Il se liquéphie à 4 atmosphères.
Azote Gazeux.
Sans couleur, odeur ni saveur.
Pesant à peu près comme l'air.
Il n'entretient pas la combustion.
Il n'est pas respirable.
Il paraît n'avoir que des qualités négatives.
Iode Écailles micacées.
Noir bleuâtre.
Fusible à +107°C.
Gazeux à +180°C.
Odeur du chlore
Saveur âcre.
Il tache la peau et le papier en jaune foncé.
Il se volatilise en un gaz violet superbe.
Il colore en bleu les fécules.
Brome Liquide.
Rouge hyacinthe.
Odeur détestable.
Poison violent.
Il répand à l'air des vapeurs âcres.
Il enflamme et ulcère la peau.
Il se conduit comme le chlore.
Silicium
Bore
Fluor
A peine obtenu à l'état de liberté.
Sélénium
Zirconium
Sans application et sans composés employés.

     Ce tableau est présenté à titre indicatif car il permet de voir une partie des éléments qui seront retenus par le filtrage sable/eau/charbon.

La réalisation du purificateur d'eau [ + ]

     Inspiré par le schémas décrit ci-dessus, pas très lisible convenons-en, voici tout d'abord une représentation stylisée de ce purificateur.

     Son corps est composé de trois seaux (inspirés de ceux utilisés au Canada pour récupérer la sève de l'érable), de deux bagues de maintient qui pourront être taillées dans des planches ou tout autre matière, ou composées de papier roulé ou de ficelle, maintenu par du ruban adhésif, ou tout autre système à votre convenance...

     Les cotes sont "interprétables". Elles sont là à titre indicatif pour étayer des proportions qui semblent adéquates.

     Les deux tuyaux mentionnés dans le descriptif original ne sont pas représentés ; seuls les trous de passage le sont. De même pour le robinet et l'éponge, cette dernière couvrant l'ouïe d'écoulement du seau intermédiaire.

     Pour puiser l'eau dans le réceptacle, on peut envisager de placer un robinet, mais également un simple tuyau faisant office de siphon, ou toute autre manière.

     Partant du principe qu'un dessin vaut mieux qu'un long discours...

Les éléments visuels [ + ]

Seau supérieur Seau intermédiaire Seau inférieur

Une bidouille rapide à réaliser [ + ]

     Tout le monde ne dispose pas forcément de seaux et/ou préfère tester le système avant de se lancer dans une réalisation plus onéreuse.

     C'est pourquoi il nous a semblé bon de réaliser un prototype qui possède l'avantage de n'utiliser que des éléments récupérés au dessus du frigo de la cuisine, là où ils ne faisaient que prendre la poussière... Ce fût fait en à peine une heure...

     Dans notre cas, ce sont de vieux bacs à glace, vides...

     L'avantage de ces bacs est qu'ils ont un couvercle, ce qui simplifie l'assemblage.

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L'assemblage terminé


Le bac supérieur percé


Le bac inférieur avec sa collerette


Le bac intermédiaire

     Ainsi, trois bacs ont été utilisés : deux grands pour les bacs inférieurs et intermédiaires et un petit pour le haut.

     L'intérêt du bac plus petit, et d'une autre marque, est que, bien que s'emboîtant dans le bac intermédiaire, des "jours" apparaissent sur le côté et évitent ainsi de devoir passer un tuyau de dépression entre ces deux unités.

     En revanche, il fallut percer des trous en haut du bac inférieur pour empêcher la surpression, laquelle empêcherait rapidement l'eau assainie de tomber dans le réceptacle.

     La "collerette" de maintient du bac intermédiaire a été réalisée en découpant un couvercle au cutter, après avoir marqué la découpe en prenant le fond extérieur du bac comme guide. Elle est fixée à l'aide de colle à chaud.

     Les trous des bacs supérieurs et intermédiaires ont été percés avec un foret de 2 mm.

     Pour le reste, chacun devra s'adapter en fonction de ses disponibilité en outillage, bacs, etc.

Derniers points : le sable ; le charbon et les bactéries, virus, et autres bestioles [ + ]

Le charbon :

     Bien qu'abordé plus haut, nous allons revenir sur le type de charbon en adéquation avec les usages mentionnés ci-dessus (filtrage, conservation des aliments, etc.)

     Comme mentionné, deux types de charbons existent :

          1° Le charbon "fossile", extrait des mines, qui s'est formé à partir de matières organiques prises dans des sédiments et fortement compressées.
          2° Le charbon "vivant, actif", issu de la combustion partielle, la calcination, de matières organiques.

     Il y a de cela quelques années, suite à une convention internationale sur le climat, une controverse s'éleva concernant la prise en compte des émissions de CO2 par les bio-carburants.

     Les ingénieurs de chez "Total", la compagnie pétrolière, objectèrent que ce CO2, contrairement à celui émis par les carburants fossiles, était parfaitement assimilable et métabolisable par les plantes.

     Immédiatement les "écologistes patentés" hurlèrent via tous les médias, rétorquant que ces ingénieurs "n'y connaissaient rien" !

     Il est évident qu'un ingénieur chimiste possède moins de connaissances en chimie organique qu'un militant écologiste ayant un niveau d'étude (scolastique ou auto-acquis) atteignant à peine le niveau du baccalauréat...

     Cependant, si nous nous référons aux propriétés du charbon mentionnées par M. Ducoin-Girardin, nous pouvons expliciter, par un raisonnement logique, le pourquoi de la plausibilité des assertions des ingénieurs : Il absorbe une grande quantité de gaz et il est poreux.

     La forte compression des matières fossiles aura tendance à resserrer les pores du charbon et en chasser une grande quantité de gaz. En revanche les pores du charbon "vivant" absorberont essentiellement l'air ambiant, plus riche en oxygène...

     Nous vous ferons grâce de la composition chimique des gaz issus de la combustion de ces deux types de matières, mais nous possédons tous un outil qui nous permet d'en saisir la différence : le nez.

     Les "fumées" de charbon de bois ont une odeur caractéristique qui, somme toute, n'est pas désagréable. En revanche, celles issues de la combustion de la houille, la lignite, le coke, etc. dégagent une odeur très acide... CQFD...

     Ainsi, ne serait-ce que parce que le diamètre des pores des charbons "vivants" est plus grand, ceux-ci auront un taux d'efficacité beaucoup plus élevé.

Les trois charbons "vivants"

     1° Le charbon "animal" : celui-ci est obtenu par la calcination des os.

     M. Ducoin-Girardin écrit que Le charbon décolore comme il désinfecte ; mais il faut ajouter que, pour cet usage, le charbon animal, moins riche en carbone, est le meilleur.

     2° Le charbon de bois.

      Il est inutile de revenir dessus, si ce n'est pour dire que pour l'obtenir, l'extinction du bois igné est effectué par "étouffement" du feu, c'est à dire par privation d'oxygène.

     Un moyen simple pour savoir à quel moment le bois en est arrivé au stade de calcination requis, est de placer une flamme à la sortie d'un évent du four de calcination. Si les gaz ne brûlent plus, c'est que ce stade est atteint et il suffit de tout fermer et d'attendre le refroidissement complet...

     3° Le charbon obtenu par le procédé de M. Salmon.

     Bien qu'abordé dans les Annales d' hygiène publique et de médecine légale . 1835,, il apparaît plus judicieux de céder la parole à M. Ducoin-Girardin car sa description du procédé, ainsi que de son usage, a le mérite de la simplicité et, accessoirement, présente un caractère comique indéniable.

     Un chimiste français, M. Salmon, n'a pas cru se dégrader en s'occupant à appliquer cette propriété du charbon à une industrie dont le titre seul répugne à notre susceptibilité. A l'aide de son procédé, le curage des fosses d'aisance n'offrira plus les inconvénients et les difficultés qu'on lui trouvait autrefois. C'est la boue, la vase qu'il tire du lit des rivières que M. Salmon fait servir à la désinfection des fosses1. La calcination dans des cylindres ou boîtes de fontes convertit les débris végétaux en charbon, qui reste très divisé à cause de son mélange intime avec l'argile et le sable. On fait de tout cela une poudre fine qu'on mêle par moitié avec les substances fétides ; dès que le mélange est opéré, toute odeur disparaît complètement. L'académie ayant nommé, pour vérifier l'épreuve de ce procédé, un savant très distingué, M. d'Arcet, que nous aurons l'occasion de citer plus d'une fois, celui-ci, après avoir assisté au curage d'une fosse (car rien ne répugne au chimiste quand il s'agit de propager une idée qui doit être un bienfait pour le pays), celui-ci, dis-je, prit avec lui un échantillon de la matière désinfectée ; il le fit circuler le soir dans son salon au milieu d'une nombreuse compagnie, comme je ne sait quel minerai ; puis ayant discuté longuement sur le mérite de l'invention Salmon, il finit par convaincre tous les incrédules en leur avouant que le prétendu minerai, qu'il avait osé faire circuler dans un compotier de porcelaine en aussi bonne compagnie, n'était pas digne à coup sûr d'un tel honneur, mais que, tout indigne qu'il en était, il n'en prouvait pas moins le mérite de l'invention.

Le sable :

     Bien que ce ne soit pas mentionné par M. Ducoin-Girardin dans le chapitre consacré au charbon, celui-ci mentionne le sable à utiliser de préférence pour les mortiers :

     Le meilleur sable, celui qui renferme le moins de matières étrangères à la silice, est le sable de rivière qui se dépose dans les lieux ou les eaux sont courantes. Le sable de route formé presque uniquement des débris de cailloux lavés suffisamment par la pluie, est aussi très bon ; le sale de carrière ne vient ordinairement qu'ensuite.

     De fait, il semblerait que le sable à privilégier est le simple sable destiné à la réalisation de ciment, mais en ayant soin de le tamiser... Quoique si les plus gros grains restent de taille acceptable...

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1 - Le vieux terreau, la sciure de bois mêlée de terre, le tan et tous débris végétaux peuvent servir au même usage.

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Se débarrasser des agents pathogènes.

     On trouve beaucoup de produits en vente pour purifier l'eau. Ceux-ci sont destinés essentiellement aux randonneurs.

     A l'armée, nous trouvions ces comprimés dans les boites de ration.

     Cependant, il est important de lire leurs notice d'utilisation : il est fortement déconseillé de les utiliser dans la durée (selon les produits, entre trois et six mois).

     A ces produits chimiques modernes de purification peut se substituer sans problème le hypochlorite de potasse plus connu sous le nom d'eau de Javelle.

     Comme on le voit, ce produit est un dérivé du chlore, produit utilisé dans toutes les stations d'épuration et qui, bien dosé, est parfaitement assimilable par l'organisme.

     Ainsi que le dit le vieil adage romain, Uti non abuti, user mais ne pas abuser.

     La dose préconisée est de trois gouttes par litre d'eau. Ceci représente à peu près, compte-tenu de la rupture de la tension de surface de la goutte, liée à la pression atmosphérique, 0,008 g./l, soit 8‰.

     Au cas ou la dose serait dépassée, il suffit de laisser l'eau à l'air libre et/ou au soleil, elle se décomposera en chlorure de sodium (sel) et en carbonate (bicarbonate de soude).

     Il semblerait que le contact avec des métaux ait le même effet, mais à ce stade, il ne nous est pas possible de dire lesquels, bien que la réaction chimique recherchée est la suppression de l'oxygène de l'hypochlorite, ce qui élimine d'office tous les métaux "zingués" et inoxydables. Le cuivre a toujours été présenté comme possédant des propriétés curatives, alors peut-être...

Conclusion [ + ]

     Souvenez-vous que le charbon doit être finement pilé !

     Pour le reste, à vous de jouer !

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